Il est des livres sans tenue, qui s'échappent tout seul et, sans doute, n'a-t-on pas besoin de les retenir en nous.
Celui-ci est tout différent. Il convie des écrivains qui me sont compagnons (Simone Weil et Pessoa par exemple), des souvenirs, du présent creusé, atterré, désastreux et bouleversé, puis ce qui, au fond de nous, sommeille, s'éteint parfois, pour revenir en veilleur, en éveilleur.
Eveilleur. Et c'est l'intensité de la vie qui gicle par saccades, et qui griffe cette vie que la vie-même sait si bien étouffer.
J'ai pensé à cette façon de tricoter le monde pour le faire parler, dans l'appui des regards et l'ampleur de quelques silences, dans ce qui reflue vers nous, des tristesses immenses, des désirs intenables, puissants et par lesquels il est bon de se laisser, de se laisser mordre, de parfaits "démineurs d'angoisse", c'est selon. Qui deviennent cela, ensuite. Hier, je disais la phisophie transportable, ici, elle est portative, c'est mieux portative, c'est moins lourd, c'est toujours dans un coin, avec soi, sa tête, son sac, sa poche.
Triste livre aussi, à tant remuer ce qui nous replie au coeur de nous-mêmes, les petites vilainies des uns, les pauvres mots des autres et ce qui touche, quand c'est touchant et qu'on est fait de chair, de peau qui réclame son dû.
Alors, il y a cette lenteur de l'esprit à prendre la mesure de ce qui arrive, cette violence, réactive à la lenteur qui vient, avec un souffle à l'arraché sur lequel ii faut bien se concentrer. S'attarder... Oui s'attarder. Respirer comment ? Respirer quoi ?
On échange des prénoms, en embarque, on s'en va, sous un porche en ogive et l'arc d'une silhouette y demeure, tout à la fois perdue et tenace.
Marie Dider parle de ce film que je n'ai pas vu ,"La religieuse portugaise" d'Eugène Green ; alors je suis allée rechercher la musique de Camané qui porte des êtres qui se parlent, se regardent et s'écoutent. C'est lent et irréel, autant que la vie peut l'être en juillet.