Le Trio Joubran, ce soir. "A l'ombre des mots", ceux de Mahmoud Darwich, de son "Art d'aimer" et je pense à Ovide que je lisais il y a longtemps. Je ne me souviens plus du livre, mais il était question de l'Amour, et ça valait bien une Craven A aux lèvres.
"A l'ombre des mots", comme on dirait "A l'ombre de nous". Des bureaux de tabac dans les poumons, l'ombre d'un autre sang avant le fantôme imposteur sorti d'un brouillard , manière irréelle, immatérielle, ineffable d'un commencement autre, d'une nature autre, d'une indéfinissable autre courbe de la ligne des boulevards. On ne reconnaît plus le chemin du désir sur les plaques des rues. Hier soir, 30 mars, j'ai vu pour la première fois celle d'Emile X, mort un 30 mars, à qui la ville rendait hommage. Emile X, sur ce bout de trottoir, en1914, et oublié depuis longtemps. Comme on oublie tout. Quand on veut oublier. On oubliera. Les hommes s'oublient toujours. Non, ce n'est pas ça ! pas vrai, l'oubli ! Ce sont les pensées qui se mettent à l'abri. Et se laissent. On se dira après qu'on s'était trompé de mots. Quelquefois les pensées n'y tiennent plus (à quoi ? allez savoir ! se trouvent des mélancolies...) et... "c'est dire comme la date, alors, se redresse dans l'oubli, l'efface..."
Trio Joubran. Dans leur voix, des notes galopent par-dessus la ville. Sur quel air danser ? Quelle musique ?
Je me chuchote ces mots : "avant que l'on ne prenne peur..." et je ne sais pas ce que ça signifie au juste. Une absurdité des choses me sidère et me cloue, fore le coeur.
"Le trio Joubran", A l'ombre des mots du poète, un envoûtement d'un Art d'amour. Mahmoud Darwich, l'exil d'une terre, de tous ces chemins, toute sa vie, un errant.
Tombera en arbre sec, trop sec, juste une oeillade accordée, un espace de miel noir, nuit sans lune.