Et ce qu'on se chuchote à soi-même, à bas-bruit...
Bas-bruit.
Les images sont des permanence au fond de la mémoire. On ne s'en défaits pas si facilement.
Est-ce qu'il faudrait en mettre certaines de côté, à côté de soi et qu'elles s'endorment là, dans leur sommeil, gardiennes des grands parachutes qui flottaient au-dessus de la mer ? Quoi faire des images ? On ne peut pas les jeter à la poubelle. Où les mettre alors ?
Elles sont fragiles, autant que la mémoire est vulnérable. Donnent l'impression d'un texte qui chavire, dont l'esprit chavire, où les esprits chavirent.
La perte des images ne devraient être ni brutale, ni violente. Voilà, ce serait un film dont le sujet pourrait s'exprimer ainsi : L' émotion d'un personnage que les images quitteraient, qui imaginerait l'émotion éprouvée par un autre personnage que les images quitteraient. La perte alors serait commune. Adoucie. Le mot de "perte", finalement, ne conviendrait plus. Il ne serait plus question de cela, mais d'autre chose. Que d'autres images viendraient creuser. La suite s'élaborerait forcément. Faudrait voir. Aller voir.
Il serait question de regards encore attouchés, un peu éloignés, mais dans une permanence des yeux qui se parleraient à bas-bruit. Feraient sauter des barrières fabriquées. Les personnages consentiraient tout la fois à une édification et à une absence.
L'un dirait : "Cette maison ressemble à une maison, mais ça n'en est pas une. Trop de personnages y vivent. Qui sont-ils ? Sommes-nous là, parmi eux et seuls, dans ce jardin où tout commence, où tout s'endort et brûle ? On sait si peu de choses. On ne sait presque jamais ce qui sera/sera pas. On invente. On sait peut-être tout, alors."
L'autre dirait : "Un homme regarde une femme le regardant la regarder ... Des regards, toujours des regards ? Mais à l'intérieur, il n'y a jamais n'importe quels mots, ...ou n'importe quel silence."
Mon nouveau caméscope est arrivé ce matin. En l'attendant, j'ai bidouillé trois minutes de film, prises par Isabelle Lagny (mon amie photographe qui m'accompagne parfois ici). C'est chez elle, à Paris en 2010. Elle me filme la filmant. L'émotion de quelqu'un qui filme une autre émotion, ...on peut tricoter autour de ça, c'est presque une photo qui bouge, c'est "l'émotion qui bouge". Les images, parfois, elles ne nous quittent pas.