Je voulais inspirer la métaphore, moi, m'élever dans les hauteurs humaines, non par excès d'orgueil, mais dans une sorte de souveraineté personnelle, une grandeur intérieure qui ne demandait rien à personne, une exigence de moi-même.
Etait-ce présomptueux de ma part ? Non. Non !
Un engagement entre moi et moi, vous voyez.
Bien que la formulation démente sans doute l' intention, vouloir inspirer la métaphore ne me paraissait ni prétentieux, ni outrecuidant, en regard de la perfection que je me réclamais d'effleurer à défaut d'atteindre, et de cette méfiance que j'ai continûment de moi-même.
A dire vrai, je trouvais même ça joli, ce "vouloir inspirer la métaphore". J'en étais assez curieuse, de cette inspiration-là.
Puis voilà que cette singularité arrive, bouscule la donne et les repères vacillent sur leur socle.
Je m'interroge.
Je me regarde, les yeux au-dedans de mon crâne. La conscience tenue, oui. Conscience tenue.
Dictionnaire Le Petit Larousse, page 648 :
Métaphore : n.f. RHET. Procédé par lequel on transporte la signification propre d'un mot à une autre signification qui ne lui convient qu'en vertu d'une analogie, d'une comparaison sous-entendue (ex : la fleur de l'âge, la lumière de l'esprit, brûler de désir, ficelle au sens de "pain", etc...)
Métaphore morte : métaphore lexicalisée, dont la qualité figurative et poétique n'est plus ressentie.
Métaphore filée : métaphore longuement développée par une suite d'associations métonymique.
La "métaphore morte", je l'ignorais jusqu'à tout de suite. Je l'ignorais, vous dis-je.
Mes déploiements d'exigence étaient-ils donc vains ?
Manqueraient plus qu'elles meurent, les métaphores, qu'elles s'y mettent, elles aussi, à fleurter avec quoi ?
des racines de pissenlits ?
Pas assez grandioses, ces pauvres herbes qui verront jamais les lumignons de la langue, ces lampes fabuleuses, les rampes de la scène et les étoiles au firmament.