Clapotis de la pluie sur mon chapeau. La foule des gens chez Mollat, la librairie. Pour un peu, on se perdrait. Les livres, ça s'offre en tout cas pour noël.
"Faut que ça se passe tranquillement !" me dit un des hommes qui régule la circulation pour le passage aux caisses. Donc pas de bousculade, ni de barrage forcé. Les gens sont civils et attendent leur tour. Ca usine dur ! Et que j'tencaisse, et que j'te fais en même temps un paquet cadeau, papier bleu ou papier orange, du ton sur ton au bon goût bordelais, sobriété et élégance.
Tiens ! Si on achetait un parapluie qu'on croirait un parasol pour son coin de sable à l'aise (blaise !) et se faire des claquettes du coin des cils... I'm singing in the rain...la la la...I'm singing in the rain, la la la ...i'm happy againnnnn...
Ca ne sent pas la résine du sapin qui gerce sous l'écorce et colle aux doigts. Ni les marrons chauds éclatés à coeur. Ca ne sent presque plus rien les livres. Juste la pluie. Et les cheveux d'argent qui rebroussent sur le nez. Quelques paillettes égarées sur le pli du manteau et sur le haut du front où poussent des baisers.
Clapotis de la pluie et demain, ce sera noël. Finalement, tout se passe pour moi avec tant de lenteur...
Pour plus de légèreté et nous relier à cette dimension de temps, voilà que je m'arrête sur une phrase de Victor Hugo, (dont justement je cherchais un livre tout à l'heure chez Mollat) :
"Il sortit de la vie comme un vieillard en sort."
Voilà comme on rate (quand on ne le fait pas exprès !) un accessit à la noble émotion. Une signification indésirable qui se superpose au sens d'une phrase pour des raisons d'homophonie, et c'est parfois une catastrophe. Amusante, d'accord, catastrophe quand même. Ces phrases s'appellent des kakemphatons.
Corneille, lui, devait bien aimer ces fantaisies.
Dans Horace, il écrit : "Je suis romaine, hélas, Puisque mon épou l'est."
Dans Polyeucte, on peut lire : "Et le désir s'accroît quand l'effet se recule."
Et ça ne serait pas fait avec malignité, ça, par hasard ?